Rituel de bénédiction d’un nouveau chevalier
The Attainment of the Holy Grail, Edward Coley Burne-Jones, 1898
Le rituel de « bénédiction du nouveau chevalier » (XIIIe siècle) ne peut être attribué à aucun ordre de chevalerie en particulier. Le rituel qui suit, correspondant à l’adoubement, en mode ecclésiastique, du nouveau chevalier, fait partie du premier livre, chap. XXVIII du Pontifical de Guillaume Durand, évêque de Mende, canoniste et curialiste, qui rédigea un recueil de rituels et textes liturgiques divers (ce Pontifical est considéré comme un miroir idéal de la chrétienté au Moyen âge. Ce rituel est complété par le chap. XXXVIII, De benedictione armorum (« bénédiction des armes ») du second livre.
Jean-Pierre Bonnerot
Bénédiction du Nouveau Chevalier
1- Dans la bénédiction du nouveau chevalier, on procède de la façon que voici. Le pontife, avant que ne soit dit l’évangile, bénit son épée en disant :
2- Bénédiction de l’épée. « Exauce, nous t’en prions, Seigneur, nos prières ; que la dextre de ta Majesté daigne bénir cette épée dont ton serviteur ici présent désire être ceint ; que dans la mesure de ta bénédiction il puisse être le défenseur des églises, des veuves, des orphelins et de tous les serviteurs de Dieu contre la cruauté des païens ; qu’il épouvante et terrifie ceux qui lui tendraient des pièges ; accorde-lui de les poursuivre dans l’équité et de nous défendre dans la justice. Par le Christ… » on répond : « Amen. »
3- Autre bénédiction : « Seigneur Saint, Père Tout-Puissant, dieu éternel, par l’invocation de ton saint nom, par la venue du Christ, ton fils, notre Seigneur, et par le don du Saint-Esprit défenseur, bénis cette épée afin que ton serviteur que voici, qui en ce jour en est ceint comme le lui accorde ta bonté, foule aux pieds les ennemis invisibles, soit victorieux en tout combat et demeure toujours sans blessure ; nous te le demandons par Jésus Christ… » On répond : « Amen. »
4- On pourrait aussi dire ici les autres bénédictions des armes, que l’on trouve à la rubrique bénédiction des armes. Les armes ainsi bénites, le pontife, avant de ceindre l’épée, entonne :
5- « Béni soit le Seigneur mon Dieu qui éduque mes mains pour le combat. » Et quand on a dit les trois premiers versets suivis du « Gloria Patri… » le pontife dit : « Sauve ton serviteur. Sois pour lui, Seigneur, une tour. Seigneur exauce… Le seigneur soit avec vous… Prions. »
6- Oraison : « Seigneur saint, Père tout-puissant, Dieu éternel, toi qui seul mets toutes choses en ordre et les disposes comme il convient, toi qui, pour réprimer la malice des méchants et pour protéger la justice, as permis aux hommes par une règle salutaire l’usage du glaive sur la terre, toi qui as voulu que soit institué l’ordre militaire pour la protection du peuple, toi qui as fait que soit dit par le bienheureux Jean, alors que des soldats venaient à lui au désert, qu’ils n’extorquassent de l’argent à personne, mais qu’ils se contentassent de leur propre solde, nous te supplions, Seigneur, et implorons ta clémence : de même que tu as accordé à ton serviteur le petit David le pouvoir de dominer Goliath, de même que tu as fait triompher Judas Macchabée de la barbarie des nations qui n’invoquaient pas ton nom, de la même façon accorde aussi à ton serviteur ici présent, qui vient de placer son cou sous le joug de la chevalerie, les forces de la piété céleste et l’audace pour défendre la foi et la justice. Accorde-lui un accroissement de sa foi, de son espérance et de sa charité ; dispose comme il convient toutes choses en lui : crainte autant qu’amour de Dieu, humilité, persévérance, obéissance et patience en bonne mesure, afin qu’il ne blesse injustement personne avec ce glaive ou avec un autre, qu’avec lui il défende ce qui est juste et droit ; lui-même est promu d’un état inférieur au nouvel honneur de la chevalerie ; que, de la même façon, il dépouille le vieil homme avec ses manières d’agir et qu’il revête l’homme nouveau afin de te craindre et de t’honorer comme il faut, d’éviter la compagnie des infidèles, d’étendre sa charité sur son prochain, d’obéir avec droiture en toutes choses à sa mission et de s’acquitter jusqu’au bout de sa fonction au service de tous selon la justice. Nous t’en prions par… » On répond : « Amen. »
7- Après cela le pontife prend sur l’autel l’épée nue et la pose dans la dextre du récipiendaire en disant : « Reçoit ce glaive au nom du Père et du fils et du Saint-Esprit et sers-t’en pour ta propre défense, pour celle de la sainte Église de Dieu, pour la confusion des ennemis de la Croix du Christ et de la foi chrétienne ainsi que la couronne du royaume de France(ou tel autre). Autant que l’humaine fragilité te le permettra, ne blesse personne injustement avec lui. Qu’il daigne t’accorder cela, Celui qui vit et règne avec le Père et le Saint-Esprit dans les siècles des siècles » On répond « Amen »
8- Ensuite, l’épée ayant été remise au fourreau, le pontife ceint le récipiendaire de l’épée avec son fourreau, et l’en ceignant il dit : « Sois ceint de ton glaive sur ta cuisse, ô toi qui es tout puissant dans le nom de notre Seigneur Jésus-Christ, mais sois attentif au fait que ce n’est pas par le glaive, mais par la foi, que les saints ont vaincu les royaumes »
9- Ceint donc de l’épée, le nouveau chevalier la sort du fourreau et, dégainée, il la brandit trois fois dans sa main de façon virile, puis il l’essuie sur son bras et la rengaine.
10- Cela fait, le pontife, distinguant ce nouveau chevalier à son caractère militaire, lui donne le baiser de la paix en disant : « sois un soldat pacifique, actif, fidèle et soumis à Dieu . »
11- Puis il lui donne un léger soufflet en disant : « Réveille-toi du sommeil du mal, et sois vigilant dans la foi en Christ et dans une réputation louangeuse ». « Amen » 12- Alors les nobles de l’assistance lui remettent ses éperons, là où il est de coutume que cela se fasse, et l’on chante l’antienne : « Ton allure te fait remarquer parmi les fils des hommes ; ceins ton épée sur ta cuisse, ô toi qui es très puissant. »
13- Oraison : « Dieu éternel et tout-puissant, répands la grâce de ta bénédiction sur ton serviteur N… ici Présent, qui désire d’être ceint de cet estoc remarquable (ou : que tu nous as Ordonné de ceindre de … ) ; rends-le confiant dans la force de ta dextre ; qu’il soit armé Par tes célestes défenses contre toutes les forces adverses afin qu’ainsi dans ce siècle il ne soit troublé par aucune des tempêtes guerrières. Par le Christ… »
14- Enfin le pontife lui donne son étendard, là où l’on a l’habitude de le faire. Pour la bénédiction de cet étendard, chercher plus bas, après la bénédiction des armes.
Bénédiction des Armes
1. On fait de la façon suivante la bénédiction des armes et de l’étendard de guerre : « Notre secours est dans le Nom du Seigneur… Le Seigneur soit avec vous… Prions. » Oraison : « Que le signe et la bénédiction de Dieu tout-puissant, Père, Fils et Saint-Esprit, soit sur ces armes et sur celui qui les revêt. Qu’il les revête Pour protéger la justice. Nous te demandons, Seigneur Dieu, de le protéger et de le défendre, toi qui vis pour les siècles des siècles. » On répond : « Amen. »
2. Oraison : « Dieu tout-puissant, en la main de qui se trouve toute pleine victoire, toi qui as même accordé des forces miraculeuses à David pour mettre hors de combat le rebelle Goliath, dans notre humble prière nous implorons ta clémence afin que par une Piété sanctificatrice tu daignes bénir ces armes. Accorde à ton serviteur N…. qui désire porter ces mêmes armes, de s’en servir librement et victorieusement pour la protection et la défense de notre Sainte Mère l’Église, des orphelins et des veuves, contre l’assaut des ennemis visibles et invisibles. Par le Christ… » On répond « Amen. »
3. Bénédiction du glaive. « Daigne bénir, nous t’en prions, Seigneur, ces épées et tes serviteurs que voici, qui sous ton inspiration désirent s’en charger, que leur piété pour toi leur soit un rempart et les garde sans blessure. Par le Christ …. » On répond « Amen. »
4. Bénédiction de l’étendard de guerre. Oraison : « Dieu tout-puissant et éternel, qui es la bénédiction et la force de tous ceux qui triomphent, jette un regard propice sur nos humbles prières et, de ta céleste bénédiction, sanctifier cet étendard qui a été préparé pour servir à la guerre ; qu’il soit fort contre les nations ennemies et rebelles et qu’il soit entouré du rempart de ta protection ; qu’il soit terrible aux ennemis du peuple chrétien ; qu’il soit assurance et confiance dans leur victoire certaine pour ceux qui mettent en toi leur foi. Tu es, Dieu, celui qui détruit les guerres et tu accordes le secours de ta céleste protection à ceux qui mettent en toi leur espoir. Par le Christ… » On répond : « Amen. »
5. Enfin il l’asperge avec l’eau bénite.
6. Dans la remise de l’étendard, on dit aussi « Reçois cet étendard sanctifié par la céleste bénédiction. Que le Seigneur te donne la grâce, pour son nom et pour son honneur, de pénétrer puissamment sain et sauf avec cet étendard les bataillons ennemis. » On répond : « Amen. »
7. Quand on le remet au porte-étendard, que celui-ci lui donne le baiser de paix .